• MARTINE SAVARD •

L’artiste et son oeuvre

Née à Montréal, Martine Savard grandit à Matagami, ville forestière isolée à 260 km au nord de Rouyn-Noranda dont la lumière nordique crue et la culture populaire originale qui s’y développe en plein territoire autochtone influenceront sa peinture. Elle détient un baccalauréat de l’Université Laval et une maîtrise de l’Université du Québec à Montréal.

À partir des années 1990, elle forge un vocabulaire pictural propre en étudiant les modes de représentations des civilisations anciennes se débarrassant une fois pour toute de la perspective. L’espace dans les tableaux devient la surface picturale comme l’ont été les parois rupestres; les figures simplifiées et exempts de volume s’y côtoient dans une organisation aléatoire sinon énigmatique. Ainsi en est-il des œuvres de l’exposition Yoma roi-empereur de Babylone (1998).

Cette manière de traiter la surface convient à l’exploration d’inventaires, d’abord à l’intérieur même du tableau, ensuite dans la série. Matagami : toponymie algonquine de l’Abitibi-Témiscamingue (2009) compte 200 tableaux de petits formats explorant l’inscription de la langue des Anishnabe dans le territoire, langue qui repose elle-même sur la description. Par exemple Abitibi qui désigne littéralement « là où les eaux se séparent », faisant référence à la ligne de partage des eaux, les unes se déversant au nord vers la Baie James, les autres au sud vers le Saint-Laurent. Ce recensement coïncide avec le retour de Martine Savard en Abitibi après un exil d’une quinzaine d’années dans les grands centres urbains de Québec et Montréal.

Pour en finir une fois pour toutes avec les ostis de panaches, présenté au MA en 2014 en duo avec Blanca Hadad, vénézuélienne rencontrée à la Biennale de La Havane, poursuit cette quête d’inscription dans le territoire. La figure de l’orignal, et même du seul panache, trophée longtemps exhibé avec la tête de l’animal sur les capots de voiture au temps de la chasse, y est emblématique. Le roi des forêts boréales y est accompagné de toute une faune sauvage ou domestique, inquiète qui épie la société des Humains énergivore qui dévore forêts, sol et sous-sol. Révélant le choc du retour vécu par l’artiste elle-même.

Les récents corpus Les lutteuses et Mon Léo Major est plus fort que ton Georges St-Pierre, foncent à fond de train dans la culture populaire à travers les figures féministes et leur combat et les figures masculines qui derrière le combat physique qui a été leur métier ont avoué leur fragilité. A contrario des œuvres de jeunesse qui élaboraient par superposition d’éléments une trame narrative énigmatique et ouverte, ces dernières œuvres restreignent les symboles qui ornent les personnages pour concentrer un discours univoque et concis, quoique déroutant, puisque distribuant les attributs féminins et masculins indistinctement à l’un ou à l’autre sans égard au sexe. Réaffirmant justement cet idéal d’être humain à la fois combattif et tendre.

En plus d’être peintre d’abord et particulièrement prolifique, Martine Savard a été professeur au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, enseigne toujours à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue et développe depuis trois ans au MA du coaching auprès d’autres artistes.

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